Le divorce doit prendre en compte les droits à la retraite

Mise à jour le 08/04/2025

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Le divorce doit prendre en compte les droits à la retraite

La Cour de cassation a récemment jugé que la prestation compensatoire versée à l'ex-conjoint doit prendre en compte les éventuels sacrifices professionnels de ce dernier susceptibles de le pénaliser à la retraite.

Une prestation pour compenser une chute du niveau de vie à la suite de la rupture du mariage

Comme son nom l’indique, la prestation compensatoire vient compenser la chute de niveau de vie de l’un des conjoints divorcés consécutive à la rupture du mariage (les partenaires de Pacs et les concubins n’y ont pas droit). Il peut s’agir :

·        d’un capital (une somme d’argent versée en une seule fois),

·        d’une rente viagère (une somme servie régulièrement jusqu’au décès), à titre exceptionnel, lorsque l’âge ou l’état de santé du créancier ne lui permet pas de subvenir à ses besoins,

·        de l’usufruit (la jouissance),

·        de la pleine propriété d’un bien immobilier.

La prestation compensatoire doit compenser la baisse de revenu à la suite d’un divorce, mais aussi l’incidence sur le futur montant de la retraite si le conjoint a consenti des sacrifices professionnels pour son ex-époux. C’est ce qu’a rappelé la première chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt prononcé le 5 mars 2025.

Moins de droits, moins de pension

La plus haute instance de la justice française avait à se prononcer sur la plainte d’une femme qui réclamait à son ancien mari une prestation compensatoire, au motif qu’elle avait mis entre parenthèses sa carrière pour privilégier celle de son ex-époux. Elle n’avait ainsi pas eu l’évolution professionnelle, et donc la rémunération, auxquelles elle aurait pu prétendre si elle n’avait pas soutenu son conjoint. Elle a moins cotisé et, par ricochet, moins acquis de droits à la retraite qu’espéré.

Dans le secteur privé, il faut gagner l’équivalent de 150 heures payées au Smic (1 782 euros brut en 2025) pour valider un trimestre de cotisation.

Dans le secteur public, il faut travailler 90 jours. Dans tous les cas, l’assuré ne peut pas valider plus de quatre trimestres dans l’année. S’il ne respecte pas sa durée d’assurance (le nombre de trimestres de cotisation exigé pour percevoir une retraite complète, qui varie selon la date de naissance), sa pension de vieillesse sera minorée de 1,25 % par trimestre manquant.

Par ailleurs, il faut savoir que les actifs du privé (salariés, indépendants) acquièrent des points de retraite complémentaire en fonction, là aussi, de leur niveau de rémunération professionnelle. En gagnant moins qu’attendu durant sa carrière, la plaignante peut avoir validé moins de trimestres et/ou acquis moins de points, ce qui va peser sur le montant de sa retraite de base et/ou de sa retraite complémentaire.

Prise en compte de la situation actuelle et future

Estimant qu’elle va percevoir une retraite moindre à cause de son ex-mari, la divorcée a donc demandé à son ancien conjoint de lui verser une prestation compensatoire.

Comme celui-ci a refusé, elle porte l’affaire en justice. Dans un arrêt rendu le 15 mars 2022, la troisième chambre civile de la cour d’appel de Chambéry rejette la demande de prestation compensatoire. Les juges du fond constatent d’abord que les ex-époux disposent de revenus quasiment équivalents. Ensuite, ils estiment qu’il ne peut pas y avoir de préjudice sur le montant de la pension de vieillesse de madame, puisqu’elle n’est pas encore partie à la retraite.

L'ex-épouse se pourvoit en cassation. La Cour de cassation lui donne raison. La Haute juridiction s’appuie sur l’article 271 du Code civil qui prévoit que la prestation compensatoire est fixée « en tenant compte de la situation (des époux) au moment du divorce », mais aussi « de l’évolution de celle-ci dans un avenir prévisible ». Elle juge que la cour d’appel n’a pas pris en compte les « droits prévisibles à la retraite » de la plaignante. En conséquence, la Cour casse et annule l’arrêt et renvoie l’affaire devant la cour d’appel de Grenoble.